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Elle s'attaque aux sujets de santé tabous dans le rugby féminin

Par Ciara Fearn
EXETER, ANGLETERRE - 16 DÉCEMBRE : Rachel Lund de Gloucester Hartpury sort du tunnel avec ses coéquipières avant le match de rugby féminin de l'Allianz Premiership entre Exeter Chiefs et Gloucester-Hartpury à Sandy Park le 16 décembre 2023 à Exeter, Angleterre. (Photo par Harry Trump/Getty Images)

Le parcours de Rachel Lund dans le monde du rugby a commencé à l’âge de six ans, lorsqu’elle est entrée pour la première fois sur le terrain du Malton & Norton RUFC, dans le Yorkshire du Nord, en Angleterre. Elle était loin de se douter que ces débuts précoces ouvriraient la voie à une carrière remarquable qui dépasse les frontières du sport pour s’orienter vers la défense des droits en matière de santé.

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Diplômée de l’Université de Worcester en thérapie du sport en 2013, Rachel Lund n’a pas perdu de temps pour se faire une place dans le monde du rugby. Rejoignant les Worcester Ladies en Premiership, elle a mis en avant ses skills redoutables, gagnant une reconnaissance à la fois nationale et internationale.

Première sélection en 2015

Au cours de la saison 2014-2015, son talent l’a propulsée au poste d’arrière dans l’équipe d’Angleterre des moins de 20 ans. Et par la suite, elle a gagné sa première sélection pour l’Angleterre lors d’une tournée au Canada en 2015.

Passant sans problème du statut de joueuse à celui de professionnelle, Lund a commencé à travailler à plein temps en tant que thérapeute sportive au Hartpury College après avoir terminé ses études. Ce changement l’a amenée à signer avec Gloucester-Hartpury en 2017, où elle continue d’exceller sur le terrain tout en poursuivant sa passion pour la physiothérapie.

Actuellement en train d’entreprendre un Master en physiothérapie, Rachel Lund est l’incarnation du dévouement en conciliant ses études et ses engagements dans le rugby à Gloucester-Hartpury, allant bien au-delà du terrain.

Joueuse et thérapeute du sport

Elle se consacre en effet à un rôle à plein temps en tant que physiothérapeute du NHS (le système de santé anglais), défendant la santé des femmes à la fois sur et en dehors du terrain. Elle a parlé à RugbyPass de son expérience de l’équilibre entre la vie de joueuse de rugby et les études de recherche.

« Je pense que les deux vont de pair en ce qui concerne mon expérience professionnelle, d’abord en tant que thérapeute du sport, puis plus récemment en tant que kinésithérapeute », explique-t-elle.

« Beaucoup de filles du club posent souvent des questions et essaient de susciter des échanges pour encourager les filles, les joueuses et les coéquipières à aller chercher de l’aide ou du soutien.

« Ce que je fais professionnellement complète vraiment ce que je fais dans un contexte sportif et je trouve que c’est génial. Je fais ce que je fais professionnellement parce que j’aime vraiment aider les gens comme mes coéquipières. C’est important de pouvoir diffuser de l’information et de sensibiliser les gens. »

L’enjeu de l’incontinence urinaire d’effort

L’engagement de Rachel Lund en faveur de la santé des femmes a culminé avec ses recherches sur l’incontinence urinaire d’effort chez les joueuses de rugby. Motivée par le manque d’attention accordée aux problèmes de santé des femmes dans le sport, elle a entrepris de briser le silence qui entoure ce sujet si sensible.

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« C’était intéressant pour moi, car je ne pensais pas nécessairement faire de la recherche sur le rugby féminin, mais en y réfléchissant, je me trouve dans une position assez unique en tant que joueuse », dit-elle.

« Lorsque j’ai eu l’idée de me pencher sur la question, je me suis sentie très motivée parce que je joue en championnat depuis plus de dix ans maintenant. Beaucoup de mes coéquipières se sont montrées très ouvertes sur la question, que ce soit lors d’une séance d’entraînement ou d’une séance de gymnastique. Elles n’hésitent pas à en parler, et c’est déjà arrivé à plusieurs joueuses.

« Je sais que beaucoup de personnes peuvent trouver le sujet embarrassant ou tabou, mais ça m’a aussi montré combien de personnes n’ont pas assez confiance en elles pour parler de ce sujet dans une sphère plus publique.

« J’ai saisi l’opportunité en tant que joueuse d’utiliser l’accès que j’avais à ce type de population, mais j’avais aussi un intérêt personnel pour ce sujet en tant que membre de l’élite des joueuses de rugby en Angleterre. »

62,5 % des joueuses de rugby en souffre

Grâce à une enquête anonyme en ligne, Rachel Lund a recueilli les réponses de 112 joueuses de rugby, révélant une statistique surprenante : 62,5 % des personnes interrogées ont déclaré souffrir d’incontinence urinaire d’effort. Cette découverte a mis en évidence le besoin urgent de sensibilisation et de soutien au sein de la communauté du rugby amateur.

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« Si l’on calcule le nombre de joueuses en championnat et le nombre de celles qui ont répondu à mon questionnaire, cela donne environ 17 ou au moins 17,5 % des joueuses de Premiership qui souffrent d’incontinence urinaire d’effort. C’est une proportion assez élevée pour un sport au Royaume-Uni », révèle-t-elle.

« Je voulais savoir dans quelle mesure il s’agissait d’un problème, mais aussi quelles étaient les connaissances des gens à ce sujet et l’impact que ça avait sur elles. C’était ou c’est toujours un problème et beaucoup d’entre elles ne comprenaient pas pourquoi cela se produisait.

« Et un peu plus de la moitié d’entre elles n’ont jamais évoqué le sujet en lui-même. Beaucoup d’entre elles ont confié que ça avait eu un impact négatif sur elles. C’était très intéressant de faire des recherches et, comme je l’ai dit, j’en suis assez fière. »

Sensibiliser pour changer les habitudes

De plus, les recherches de Rachel Lund ont mis en lumière l’impact néfaste de l’incontinence urinaire d’effort sur le bien-être physique et psychologique des joueuses. Nombre d’entre elles ont avoué avoir modifié leurs habitudes d’hydratation et d’entraînement, ce qui illustre les répercussions profondes de problèmes de santé non traités sur les performances sportives.

Forte de ses conclusions, la joueuse et thérapeute souhaite initier un changement de comportement dans le paysage sportif en partageant ses recherches auprès des clubs de rugby féminin. En favorisant la compréhension et en plaidant pour de meilleures installations et de meilleurs systèmes d’accompagnement, elle espère provoquer un changement positif et donner aux athlètes féminines la possibilité de donner la priorité à leur santé.

« Je connaissais quelques joueuses qui en parlaient ouvertement, mais lorsque j’ai posé cette question dans le cadre de l’enquête, la majorité d’entre elles disaient qu’elles n’en parlaient à personne et qu’elles étaient encore moins susceptibles d’en discuter avec un kiné, un médecin de l’équipe, des personnes compétentes, etc. », admet-elle.

Des mesures peuvent être prises

« Je souhaite pouvoir les soutenir et les guider vers l’aide adaptée. L’idée selon laquelle c’est inévitable et qu’on ne peut rien y faire est très répandue. Ce que je veux souligner et transmettre à travers cette étude, c’est qu’il existe des mesures concrètes que l’on peut prendre.

« Beaucoup de personnes ont dit que ça avait eu un impact négatif sur elles. Et en ce qui concerne l’impact sur le sport lui-même, certaines personnes buvaient moins d’eau, ce qui, du point de vue de la performance, est important.

« Certaines personnes ne portaient pas autant de poids à la salle de sport et, dans l’ensemble, elles pensaient que cela avait un impact négatif. Je pense que c’est important quand on aborde le sujet de sport d’élite et de sport semi-professionnel.

« Certaines de ces femmes sont des athlètes professionnelles. Nous faisons référence à ce fameux 1% dans notre sport, notre domaine, et je suis convaincue que ça aura naturellement un impact sur nous toutes. D’après les réponses à certaines de mes questions, il semble que ça ait déjà un impact significatif sur les joueuses. »

Mettre en lumière les questions de santé féminine

La recherche de Rachel Lund va au-delà de l’impact immédiat sur la communauté du rugby amateur. Elle agit comme un catalyseur pour des débats plus vastes sur l’inégalité des sexes dans la recherche sur les soins de santé. À travers son travail, elle cherche à accroître la visibilité des questions de santé féminine et à remettre en question les normes dominantes qui privilégient la recherche centrée sur les hommes.

« Lorsque je collectais ces données, l’année dernière à la même époque, le nombre de filles qui venaient me voir après un match ou les joueuses contre lesquelles je jouais venaient me voir pour discuter du sujet en me disant : “T’es la fille qui s’intéresse à l’incontinence d’effort dans le sport, je ne savais pas que d’autres filles en souffraient”.

« Elles me serraient la main et me disaient à quel point elles étaient reconnaissantes. Je trouve que c’est génial de sensibiliser les gens à ce sujet, mais aussi, plus généralement, de les sensibiliser à la recherche sur la santé des femmes et au fait qu’il existe une énorme inégalité entre les hommes et les femmes dans le domaine de la recherche sur la santé. »

Rachel Lund n’est pas seulement une athlète accomplie, c’est aussi une militante attentionnée de la santé féminine. Alors qu’elle continue à briser les barrières et à s’attaquer aux tabous, son parcours illustre le pouvoir de transformation du sport pour susciter des changements significatifs.

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