Irlande - Nouvelle-Zélande : quatre éléments à suivre
En un après le formidable quart de finale de Coupe du Monde, l’Irlande et la Nouvelle-Zélande se retrouvent à Dublin ce vendredi soir.
Irlande – Nouvelle-Zélande, ce vendredi soir, est sans contestation possible l’affiche à ne pas manquer de ce week-end d’Autumn Nations Series.
13 mois après le fantastique quart de finale de Coupe du Monde entre les deux équipes, directement classé parmi les meilleurs matchs de l’histoire du rugby, Irlandais et All Blacks se retrouvent à l’Aviva Stadium pour lancer en fanfare les célébrations des 150 ans de la IRFU, la fédération irlandaise.
Andy Farrell et Scott Robertson ont dévoilé leur équipe respective mercredi. Le sélectionneur du XV de Trèfle va aligner 10 des 15 titulaires du quart de finale perdu 28-24, et 17 des 23 joueurs qui y ont participé.
Le nouveau boss des Kiwis, lui, lancé dans une mission de renouvellement de l’équipe, a reconduit sept des titulaires, et 10 des 23 participants à ce match entré dans la légende.
La Nouvelle-Zélande arrive à Dublin après une campagne décevante en Rugby Championship malgré la 2e place finale avec trois défaites en route, à peine contrebalancée par les victoires décrochées contre le Japon à Yokohama et l’Angleterre à Londres. L’Irlande, en revanche, n’a pas joué depuis sa victoire spectaculaire sur l’Afrique du Sud à Durban le 13 juillet.
RugbyPass a retenu quatre éléments à suivre plus particulièrement sur cette rencontre.
Les All Blacks ont une aura à restaurer
Il faut rendre hommage à Andy Farrell et à Rassie Erasmus pour la façon dont ils ont méthodiquement déconstruit le rayonnement des All Blacks depuis qu’ils ont la charge de l’Irlande et de l’Afrique du Sud.
Avant leur arrivée, les Irlandais n’avaient jamais battu la Nouvelle-Zélande en 29 tentatives, tandis que les Springboks restaient sur une série pâlichonne de deux victoires seulement en 17 rencontres.
Maintenant, jetons un œil aux derniers résultats. Farrell a mené son équipe à la victoire cinq fois en neuf rencontres face à la Nouvelle-Zélande depuis 2016, qu’il soit entraîneur de la défense ou entraîneur en chef. Il s’occupait également de la défense de Lions britanniques et irlandais en 2017 quand ces derniers ont fait match nul sur l’ensemble de la série.
Pendant ce temps-là, Erasmus affiche le bilan encore plus flatteur de sept victoires, un nul et cinq défaites, que ce soit en tant que sélectionneur ou directeur de la performance des Springboks.
Bien joué, Messieurs les coachs, pour avoir su remettre en question l’imaginaire dans l’esprit de tout un chacun, qui faisait des All Blacks une équipe quasi imbattable.
L’Afrique du Sud a remporté ses quatre derniers tests contre son meilleur ennemi et la tâche de Farrell, dont l’équipe a tenu tête aux Springboks sur leur sol cet été (une victoire partout), est de mettre en place un plan de jeu qui corresponde à l’attente générale d’une victoire de l’Irlande ce vendredi soir.
Vainqueurs de la série en Nouvelle-Zélande en 2022 puis du match à Dublin qui avait suivi en novembre de la même année, les Irlandais s’étaient pris les pieds dans le tapis lors de la Coupe du Monde.
Mercredi, Farrell a insisté sur le fait que ce match de tournée d’automne ne constituait pas une revanche. Tout en avouant que l’énorme déception que cette défaite a générée avait fourni toute la motivation nécessaire à ses troupes pour préparer la rencontre.
Habituée à faire la course en tête, l’Irlande a été menée durant 77 minutes à Paris, et n’a pas su gérer cette pression. Cela s’était traduit par une différence flagrante dans le nombre de turnovers, l’Irlande ayant perdu 11 ballons, contre trois pour la Nouvelle-Zélande.
L’autre stat marquante de cette rencontre, c’est le 14-3 passé aux Blacks par les Irlandais durant les 20 minutes de supériorité numérique, à mettre en comparaison avec le 25-10 en faveur des triples champions du monde pendant l’heure de jeu où les deux équipes évoluaient à 15.
De qui entamer douloureusement la crédibilité des Irlandais sous l’ère Farrell. Il leur incombe de prendre un meilleur départ, de ne pas se laisser distancer par un insurmontable 0-13 au bout de 20 minutes et de conserver le ballon quand ils l’ont en main.
La mêlée irlandaise attendue au tournant
En matière de crédibilité, s’il y a un joueur irlandais qui doit se montrer à la hauteur, c’est Andrew Porter. Le pilier gauche n’hésite jamais à montrer sa colère quand les choses ne se passent pas comme il le souhaite et il n’avait pas apprécié d’être pénalisé deux fois en mêlée par l’arbitre Wayne Barnes.
« Je bouillais intérieurement car j’avais le sentiment de ne pas avoir été traité équitablement », reconnut-il un mois après le match.
S’il est toujours animé de cette rage, il faut qu’il réagisse avec force pour mettre sous pression la mêlée néo-zélandaise et avoir suffisamment d’impact pour convaincre l’Australien Nic Berry, qui officiera au sifflet ce vendredi, de trancher en sa faveur.
Porter n’était toutefois pas considéré comme le seul fautif au Stade de France. Finlay Bealham a également été puni de l’autre côté de la première ligne par Barnes après avoir remplacé Tadhg Furlong.
Bealham est désormais titulaire, Furlong étant absent sur blessure. Il y a également un changement chez les piliers adverses : Tamaiti Williams est titulaire à gauche, Tyrel Lomax étant son pendant à droite.
Les trois pénalités concédées par l’Irlande il y a treize mois l’ont été dans le camp des All Blacks et aussi bizarrement que cela puisse paraitre, les hommes en vert n’ont jamais eu l’occasion de lancer le jeu depuis une mêlée jouée dans leur moitié de terrain.
Ils ont aussi été en souffrance sur les mêlées défensives en Afrique du Sud cet été. Souvenez-vous de l’essai de pénalité concédé au ‘bomb squad’ à Pretoria. Il faudra John Fogarty, l’adjoint de Farrell en charge de la conquête ait solutionné ce problème.
L’Aviva Stadium imprenable depuis plus de trois ans
En quittant l’Aviva Stadium le jour de Saint-Valentin 2021, qui aurait cru que quatre ans plus tard, l’Irlande y aurait enchaîné 20 victoires de rang ?
Ce jour-là, face à l’équipe de France, l’Irlande avait été méconnaissable. Son manque d’énergie et de créativité lors d’une défaite à huis clos contre les Bleus lors du Tournoi des Six Nations avait même fait craindre que Farrell ne soit pas fait pour le poste de sélectionneur, après des années passées dans l’ombre en tant qu’adjoint.
Depuis, leur progression a été spectaculaire. La série en cours comporte trois victoires contre l’Angleterre et l’Italie, deux victoires contre l’Écosse, le pays de Galles et le Japon, et une victoire contre la Nouvelle-Zélande, l’Afrique du Sud, la France, l’Australie, l’Argentine, les Fidji et les États-Unis. Pas mal.
Le doute réside dans le fait que l’Aviva Stadium, qui a ouvert ses portes en 2010 sur le site du mythique Lansdowne Road, ne s’est jamais distingué par son ambiance. Les visiteurs ne s’y sentent jamais intimidés, même si les choses commencent à changer depuis la fin de la pandémie due au Covid-19.
Certes, il y a encore des frustrations, notamment en ce qui concerne les spectateurs qui privilégient les pintes aux points et se déplacent constamment pour aller remplir leur verre, au grand dam des supporters qui ont parfois bien du mal à voir la pelouse. Mais l’Aviva joue de mieux en mieux son rôle de 16e homme.
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Caelan Doris a-t-il l’étoffe d’un capitaine ?
Il n’a pas fallu longtemps aux Néo-Zélandais pour prendre leurs quartiers en descendant de l’avion en provenance de Londres. Ils ont rapidement été photographiés en train de dîner chez Gleesons à Booterstown, tout près de leur hôtel de Stillorgan Road, avec le futur joueur du Leinster Jordie Barrett. Le polyvalent All Blacks a passé une partie de son enfance dans une ferme de Co Meath lorsque son père jouait dans la All Ireland League pour les Buccaneers.
En milieu de semaine, Scott Robertson a également évoqué son année sabbatique à Ards, en Irlande du Nord, hors des sentiers battus. Lorsqu’il est rentré chez lui et qu’il a signé son contrat avec les Crusaders, son contrat prévoyait qu’ils lui payent ses études à l’université de Lincoln.
Cet apprentissage est toujours en cours pour Robertson. Il a dirigé 11 matchs en tant que sélectionneur, et se verrait bien ajouter le scalp de l’Irlande à son bilan de 8 victoires et 3 défaites pour améliorer sa réputation.
La façon dont il dirigera son équipe depuis les tribunes à Dublin sera observée de près, mais il ne sera pas le seul « rookie » scruté à la loupe. Le N.8 irlandais Caelan Doris a été nommé capitaine de Farrell et la façon dont il se comportera avec l’arbitre Berry attirera l’attention.
Il s’est attiré les critiques à propos de sa manière de communiquer avec l’arbitre Luke Pearce lorsqu’il a repris le brassard de Peter O’Mahony lors de la défaite du test de juillet dernier à Pretoria.
Il a toutefois mieux assimilé son rôle la semaine suivante avec Karl Dickson au sifflet, lors de la victoire rapportée de Durban. Doris a depuis assumé de façon permanente le rôle de capitaine du Leinster et de l’Irlande.
Comme les Lions britanniques et irlandais partent en tournée l’été prochain, il est fortement pressenti pour diriger l’expédition en Australie sous la direction de Farrell. Une démonstration de leadership face aux All Blacks et un bon rendement dans son face-à-face avec Ardie Savea constitueraient un excellent début pour cette candidature.
Cet article a été initialement publié en anglais sur RugbyPass.com et adapté en français par Jérémy Fahner.
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