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Le danger, c’est de « footballiser le rugby », selon un spécialiste de la haute performance

Le professeur Pierre Dantin analyse les moteurs de la haute performance dans un troisième épisode du BastaShow avec Mathieu Bastareaud.

On a du mal à se l’imaginer comme ça derrière sa silhouette rondouillarde, sa bonhommie et sa langue chantante propre à donner espoir à la plus mauvaise des équipes. Mais Pierre Dantin, avant d’être un éminent professeur spécialisé dans la haute performance, a été un bad boy. Un vrai.

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« J’étais ultra violent », raconte-t-il face à Mathieu Bastareaud dans le troisième épisode du BastaShow, à retrouver en exclusivité sur la chaîne YouTube de RugbyPassFR. « Je n’étais pas promis à être professeur un jour, c’était pas mon histoire. J’étais borderline quand j’étais gamin, jusqu’à ce qu’on me voit différent des autres, qu’on voit que j’avais d’autres compétences ou d’autres volontés d’être moi. Le rugby, ça a été une catharsis de ma violence. »

De son expérience personnelle, il a conçu des outils d’analyse des plus grands joueurs et des plus grandes équipes. Car comme il aime à le rappeler, si le haut niveau est le chemin vers le sommet, la haute performance c’est pour le gagner.

Et pour y parvenir, les ressorts de la réussite sont à rechercher au plus profond des joueurs. C’est ce qui caractérise par exemple les Springboks, champions du monde pour la quatrième fois de leur histoire en France en octobre 2023.

La leçon des Springboks

« Ils n’étaient pas les favoris », rappelle le Professeur Pierre Dantin. « Mais tu sens que cette équipe a un moteur intérieur. Quels que soient les films de leur vie interne, c’est d’abord construit sur l’histoire, leurs origines, la fierté d’appartenance, le sentiment fort d’être en mission pour un pays.

« Ecoute Kolisi », conseille-t-il à Mathieu Bastareaud dans le BastaShow. « T’as l’impression d’entendre un petit fils de Mandela dans son approche. Il est ce qu’il est. Cheslin Kolbe est comme ça aussi. C’est du Romain Gary. C’est ça l’esprit Springboks. »

La culture d’une équipe d’un côté, sa stratégie de l’autre. « Ce qui les a fait gagner, c’est aussi une force de ce qu’ils sont, de ce qu’ils ne sont pas, comment ils doivent s’adapter aux autres », développe le professeur.

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« La bataille tactique, l’art de la ruse, c’est comprendre ce que va faire l’autre au moment où il va essayer de s’adapter à toi. C’est le temps d’avance, pas d’après. Le fait d’avoir un banc à 7-1, tu crées déjà le doute chez les autres », évoque-t-il en référence à la tactique adoptée par le duo Nienaber-Erasmus pour battre la France en quart de finale.

« Mais c’est surtout la loyauté absolue. Si Kolisi n’a pas été assez bon sur un match, il va s’asseoir. Tous, quelle que soit leur réputation, la représentation sociale qu’on a d’eux, ils sont d’abord Springboks et joueurs. C’est à méditer. Ça évite de mettre des pressions folles sur les uns et les autres, d’avoir un sauveur plus malin. Ce qui te sauve dans le rugby, c’est l’équipe. »

Le cas Dupont

Et c’est à ce moment précis que l’on est tenté de penser à l’équipe de France, éliminée par les futurs champions du monde, et qui, on est bien obligé de l’admettre, n’actionne pas les mêmes leviers que les Sud-Africains pour parvenir au sommet.

La preuve la plus flagrante est l’ultra-utilisation de son maître à jouer, meilleur joueur du monde à bien des égards, Antoine Dupont.

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« Tout ce qui s’est passé autour d’Antoine Dupont, ça a créé des conditions d’une forme de doute intrinsèque », remarque le Professeur Pierre Dantin.

« On a un peu footballisé le rugby, comme si tout tournait autour d’un seul symbole (Antoine Dupont, ndlr). Il a du génie, c’est un super bon mec, il est extraordinaire, mais on ne peut pas lui demander, trois semaines après une anesthésie, de jouer 80 mn et d’être harcelé par les demis de mêlée. C’est très facile de le dire a posteriori. Et tout ce que je dis n’est pas un jugement », prévient-il.

Absent du XV de France et voilà que les Bleus perdent leurs repères, voire leurs rencontres, comme face à l’Irlande en ouverture du Tournoi des Six Nations à Marseille le 2 février.

« Ce qui s’est passé, c’est un peu trop gros pour être vrai. Attendons la suite du Tournoi pour avoir des confirmations ou des infirmations », s’étonne le Professeur.

« Que la présence ou la non-présence d’Antoine, ça voudrait dire que le rugby français serait assujetti à un seul joueur ? C’est bien triste pour le rugby. Ce serait une insulte à tous les autres joueurs, quel que soit le génie d’Antoine Dupont. Il est hors-normes. Mais les Sudafs ont montré aussi comment jouer… »

Il le répète : « Tout ce qu’on a appris, faut le capitaliser, que ça serve de leçon. Transformons vite et que cette entame de Tournoi ne soit qu’un contre-évènement. »

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