Les clubs anglais sont-ils les seuls à blâmer pour leurs performances en Champions Cup ?
Après le premier tour des matchs à élimination directe, les 8es de finale disputés ce week-end, il ne reste qu’un seul club anglais en course en Champions Cup.
Northampton, vainqueur de Clermont vendredi, sera un en effet le dernier représentant de Gallagher Premiership en quart de finale, où l’on retrouvera quatre clubs français (Toulouse, Toulon, Bordeaux-Bègles et Castres) et trois clubs issus du United Rugby Championship (les Irlandais du Leinster et du Munster, les Écossais des Glasgow Warriors).
Avouons que cela fait un peu tache pour le pays qui a inventé ce sport, et que cela reflète bien les problèmes du rugby domestique en Angleterre, avec les disparitions récentes des Wasps, de Worcester et des London Irish.
Au-delà de ce constat brut, la façon dont ont été sortis les clubs anglais interpelle : les Harlequins ont pris été ridiculisés à Dublin (62-0), tandis que les Saracens ont explosé après 30 minutes en surrégime à Toulon (72-42).
D’autant que cela intervient après des défaites-fleuves concédées lors de la phase de poule. Exeter (21-64 contre Toulouse, 17-69 contre l’UBB), Leicester (80-12 à Toulouse) ou encore Bath (47-21 au Leinster) et Sale (40-0 chez les Stormers) avaient également cédé dans des proportions inquiétantes.
« Des hommes contre des petits garçons »
« On aurait dit des hommes contre des petits garçons », ose l’ancien international irlandais Bernard Jackman dans sa chronique publiée dans The Irish Independent à propos des matchs de ce week-end.
« Ces dernières années, le fossé s’est creusé entre les prétendants et les outsiders de la Champions Cup. Le Leinster, Toulouse, La Rochelle, le Munster, Toulon et Bordeaux fait partie des prétendants. Les Harlequins sont des outsiders. »
Les ‘Quins’ avaient pourtant atteint les demi-finales l’an dernier, se payant notamment l’UBB en quarts de finale au stade Chaban-Delmas (42-41).
L’ancien entraîneur de Grenoble pointe deux raisons à la débandade quasi générale des Anglais. Il y a d’abord le format de la Champions Cup en lui-même, et l’instauration des 8es de finale, ce qui a débouché sur « un système de groupe où il est plus difficile d’être éliminé que qualifié ».
Le championnat anglais, réduit à seulement dix clubs, constitue une autre composante du problème selon celui qui est devenu un consultant respecté à la télévision irlandaise. « La présence de huit des neuf équipes de la Premiership anglaise (10 en réalité, NDLR) dans la compétition principale […] conduit à des matchs comme ça. »
Brian Moore, dans The Telegraph, élargit le débat aux franchises sud-africaines, disparues de la circulation avant même d’attaquer les matchs à élimination directe.
« Qui va mettre de l’argent sur d’autres équipes que les Français et les Irlandais ? »
« Ce fut un bon week-end de Champions Cup pour les équipes françaises et irlandaises, tandis que les équipes anglaises et sud-africaines, à l’exception des Northampton Saints, ont connu un week-end tout aussi désolant », juge l’ancien talonneur.
« Il est encore trop tôt pour désigner les vainqueurs, mais qui va mettre de l’argent sur des équipes en dehors des deux premiers pays mentionnés ? », écrit-il, écartant de fait les Saints et les Warriors.
Depuis la victoire surprise d’Exeter en 2020, aucun club anglais ne s’est hissé en finale. Mais peut-on vraiment leur reprocher de ne pas jouer le jeu à 100%, à la manière des Saracens qui ont mis au repos leurs internationaux anglais au moment d’aller à Toulon ?
Non, selon Moore. « Avant d’attaquer les entraîneurs qui ont aligné des équipes trop faibles, je pense qu’il faut prendre en compte la charge de travail des joueurs et la situation des clubs dans leur championnat national.
« Les Harlequins et les Saracens cherchent encore à s’assurer une place dans les quatre premiers et considèrent évidemment cela comme une priorité », écrit-il.
La sempiternelle question du calendrier
« C’est compréhensible, mais cela ne fait rien pour la viabilité de la compétition européenne. Ce n’est pas acceptable non plus pour ceux qui dépensent leur argent pour soutenir leur équipe à l’extérieur ».
Que faire, alors, pour redonner de l’intérêt sportif à la compétition phare des clubs ? On ne peut décemment pas demander à Toulouse ou au Leinster d’aligner une équipe bis sous prétexte qu’ils disposent d’effectif XXL.
L’ancien international anglais encourage plutôt les instances à revoir le calendrier : les compétitions continentales de clubs doivent s’articuler autour des championnats nationaux, des tournées d’automne et du Tournoi des Six Nations. Sans oublier que les franchises sud-africaines sont intégrées à un calendrier qui ne prend pas en compte leur équipe nationale…
Difficile, dans ces conditions, d’être présent sur tous les tableaux sans avoir une cinquantaine de joueurs à disposition, à la manière du Stade Toulousain l’an dernier.
« Je ne prétends pas qu’il soit facile de résoudre ce problème. Je dis que si le rugby des clubs veut progresser et, plus important encore, s’il veut que les diffuseurs paient davantage diffuser ses compétitions, il doit examiner ce point de plus près et trouver un moyen de remédier au chaos actuel ».
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