Matt Giteau, Eddie Jones et la bière d'anniversaire

Par Jérémy Fahner
Matt Giteau (ici au lendemain de la finale perdue contre l'Angleterre) a fêté son 21e anniversaire en pleine Coupe du Monde 2003 (Photo by DALLAS KILPONEN/POOL/AFP via Getty Images).

On sait qu’Eddie Jones est un personnage à part dans le monde du rugby pour ses compétences, sa vision, mais aussi ses saillies face aux journalistes.

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Le technicien australien, considéré parmi les meilleurs du monde, est passé par le Japon, l’Angleterre ou encore l’Afrique du Sud, et a logiquement dirigé la sélection de son pays.

Une première fois avec un certain succès, entre 2001 et 2005 avec notamment une finale mondiale à la clé. Puis en 2023 pour un passage beaucoup plus mitigé, entre choix des joueurs retenus contesté, faible niveau de jeu et élimination au premier tour de la dernière Coupe du Monde.

De nouveau à la tête du Japon depuis l’après RWC 2023, il va sans doute refaire parler de lui. En attendant, un joueur qui l’a bien connu raconte ce qui fait de lui un entraîneur unique.

A 41 ans, Matt Giteau court toujours sur les terrains de rugby, même s’il a mis au clou le maillot des Wallabies.

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L’ancien Toulonnais, aujourd’hui en Major League Rugby, est revenu pour RugbyPass sur sa relation avec Eddie Jones. Et livre quelques anecdotes croustillantes qui illustrent bien pourquoi l’Australo-Japonais est un cas à part dans le monde du rugby.

« Eddie, aujourd’hui… Il continue à me faire peur », démarre Giteau. « Je continue de le voir avec le regard du gamin de 19 ans que j’étais quand il m’a retenu pour la première fois ».

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Jones a offert sa première sélection à Giteau alors que ce dernier avait tout juste 20 ans, le 16 novembre 2002 contre l’Angleterre, puis l’a retenu pour la Coupe du Monde 2003.

C’est d’ailleurs au cours de ce Mondial que le trois-quarts polyvalent a découvert les facettes multiples de son sélectionneur.

« J’ai fêté mon 21e anniversaire pendant la Coupe du Monde 2003, rembobine Giteau. On était à l’entraînement et j’entends Eddie me dire : ‘Gits, c’est ton anniversaire aujourd’hui mate.

« Je lui réponds que oui, et lui me dit : ‘Je ne veux pas que tu boives. On a entraînement demain, tu ne bois pas ce soir’.

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« Je réponds ok, pas de problème. Vous savez, si Eddie me dit de me lécher les orteils, je me lèche les orteils ! Donc s’il dit ‘pas d’alcool’, je réponds ok, je ne bois pas.

« Le soir, on prend le diner tous ensemble, le gâteau arrive, les gars me chantent bon anniversaire… Tiens d’ailleurs, ils ne m’avaient pas fait de cadeau !

« Ensuite les gars me disent qu’on pourrait aller au bar, descendre une petite bière pour l’occasion. Ils veulent faire ça pour moi, mais je réponds ‘ça va, j’ai pas très envie d’une bière, je vais boire de l’eau.’

« Et là Eddie se pointe : ‘Gits, c’est ton anniversaire mate, tu as bien droit à une bière !’ »

Tempête sous un crâne. Le jeune Giteau se retrouve complètement désarçonné par le comportement contradictoire de son coach.

« Je me dis : ‘Il fait quoi là ? Il me teste ou quoi ?’ Je ne savais pas si je devais prendre cette bière ou pas. Les gars proposent d’aller boire une bière pour mon anniversaire. Eddie me dit juste avant que je ne peux pas boire ce soir, puis devant les autres, me dit d’aller boire un coup. »

La réflexion est rapide, et le joueur, respectueux de la parole de son boss, décline gentiment la proposition.

« ‘Non non, c’est bon Eddie’. Et lui me dit ‘Mate, on est là pour toi mate. Juste une bière, ça ne peut pas te faire de mal’. Et là, il me paie une Corona et s’assoit en face de moi », se rappelle Giteau en imitant le phrasé de Jones.

Matt Giteau, 21 ans à l’époque, faisait partie du squad australien convoqué par Eddie Jones pour la Coupe du Monde 2003 (WILLIAM WEST/AFP via Getty Images).

« Je ne savais pas quoi faire. Je ne me souviens même pas si je l’ai sifflée mais quand je suis retourné dans ma chambre, j’étais perdu. Est-ce que j’ai bu ? Est-ce que je vais me faire virer ? »

Giteau était bien resté dans le groupe australien, qui disputait le Coupe du Monde 2003 à domicile. Blessé en quarts de finale contre l’Ecosse, il ratera demi-finale et finale (défaite 17-20 devant l’Angleterre).

« C’est juste un exemple de ce que représente Eddie pour moi », avance l’homme aux 103 capes en ‘green and gold’, qui ressort une autre anecdote de sa mémoire.

« Il me prenait souvent à part après l’entraînement pour me dire ‘Mate, techniquement c’était pas génial aujourd’hui, mate. Il faut que tu travailles plus.

« Je répondais ‘Ok, pas de souci, je vais m’y mettre’.

« Et devant le reste du groupe, il était du genre : ‘Oh Gits, tu as été incroyable aujourd’hui, mate’.

« Après ça, les autres joueurs venaient me voir en me disant : ‘Eddie t’aime vraiment bien, tu es son petit chouchou’.

« En coulisses, il tenait un autre discours, ce qui m’a permis de garder les pieds sur terre, de continuer à travailler dur. J’ai compris que le travail paie si tu veux devenir meilleur, si tu veux durer. »

Joueur exceptionnel par son talent, sa polyvalence, son côté altruiste et sa longévité, Matt Giteau semble avoir appliqué à la lettre les leçons du maitre.

« Ça continue de raisonner en moi ». Par contre, on ne saura pas s’il a bu sa bière d’anniversaire.

 

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S
Shaylen 6 hours ago
Should rugby take the road less travelled?

If rugby chooses to embrace flair then it may err too much towards it and may become too much like league with the set piece becoming inconsequential in which case it becomes repetitive. If rugby chooses power then it becomes a slow drab affair with endless amounts of big men coming off the bench. Rugby needs to embrace both sides of the coin. It needs to have laws receptive to the power game but also laws that appreciate flair and running rugby. Where contrasting styles meet it generates interest because one side could beat the other with completely different plans as long as they execute their gameplan better and show great skill within their own plan. The maul and scrum should not be depowered at the same time laws that protect the team in possession should also be put in place with a clear emphasis to clean up and simplify the ruck and favour the attacking side while allowing a fair chance for the poacher to have an impact. Thus we set the stage between teams that want to build phases vs teams that want dominance in the set piece who slow the game down and play more without the ball off counterattack. The game needs to allow each type of team an opportunity to dominate the other. It needs to be a game for all shapes and sizes, for the agile and the less subtle. It needs to be a game of skill that also embraces the simplicity of the little things that allows teams of all qualities to stand a chance.

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