Édition du Nord

Select Edition

Nord Nord
Sud Sud
Mondial Mondial
Nouvelle Zélande Nouvelle Zélande
France France

Montpellier « humilié » doit-il changer de propriétaire ?

MOHAMED ALTRAD

Par Gavin Mortimer

Je ne veux pas dire « je vous l’avais bien dit », mais, pourtant, « je vous l’avais bien dit ». Lorsque Montpellier a présenté Patrice Collazo comme son nouvel entraîneur en novembre dernier, j’ai prédit que ça ne se passerait pas mieux. Je me suis dit qu’il était l’équivalent pour le rugby français de Sam Allardyce pour le football anglais : un homme grand par la carrure mais petit par la stratégie.

ADVERTISEMENT

Montpellier était dernier du Top 14 lorsque Collazo a été engagé pour remplacer Richard Cockerill. Il reconnaît l’ampleur de la tâche mais affirme aux médias qu’il est prêt à relever le défi. Six mois plus tard, Montpellier est avant-dernier ; à proprement parler, Collazo a eu un effet positif sur le club méditerranéen, mais une 13e place au lieu d’une 14e n’est probablement pas ce que Mohed Altrad, le propriétaire du club, avait à l’esprit lorsqu’il a procédé à la désignation de Collazo.

La claque de l’USAP

La dernière victoire de Montpellier en Top 14 remonte au 9 mars, lors d’une victoire 10-3 sur l’Union Bordeaux-Bègles. Depuis, les Montpelliérains ont perdu tous leurs matchs : à l’extérieur contre Pau et Toulon (54-7 pour ce dernier), à domicile contre le Stade français et Perpignan, puis d’un point à Castres dernièrement.

Patrice Collazo (Montpellier) avant le match du Top 14 entre le Montpellier Hérault Rugby et le Rugby Club Toulonnais (Toulon) au stade GGL de Montpellier, dans le sud de la France, le 7 janvier 2024. (Photo by Pascal GUYOT / AFP) (Photo by PASCAL GUYOT/AFP via Getty Images)

La défaite contre Perpignan, un derby local, a été particulièrement humiliante. Perpignan a attiré environ 4 000 supporters au stade GGL, alors que le nombre officiel de billets était de 625. Avant le match, Altrad avait refusé d’augmenter le nombre de billets pour le club catalan, déclarant en riant que « le public de Perpignan ne doit pas nous envahir lors de la rencontre. Ça reste le stade de Montpellier, ça n’est pas Aimé-Giral ». Mais les supporters perpignanais ont obtenu des billets et le bruit qu’ils ont fait a donné l’impression que leurs joueurs jouaient chez eux.

Un club sans identité sous White et Cotter

L’expérience a été éprouvante pour Altrad. Mais il ne peut s’en prendre qu’à lui-même. Il y a deux ans, le magnat des affaires semblait avoir réalisé son ambition de transformer Montpellier en une machine surpuissante. Après avoir acheté le club en 2011 pour 2,4 millions d’euros, Altrad a vu peu de retour sur son investissement au cours de la première décennie ; Montpellier a atteint deux finales du Top 14 mais a perdu les deux, et le club n’a remporté que la Challenge Cup européenne en 2016 et 2021.

La victoire de 2021 a été orchestrée par Philippe Saint-André, qui a été engagé comme directeur du rugby par Altrad en mars 2020. L’entraîneur principal était Xavier Garbajosa, l’ancien arrière de l’équipe de France, qui occupait son poste depuis 2019, en remplacement de l’expérimenté Vern Cotter. Ce dernier avait à son tour succédé à Jake White en 2017.

À eux deux, le Sud-Africain White et le Néo-Zélandais Cotter avaient fait de Montpellier un club sans identité forte. C’en était trop pour certains. Charles Géli, le talonneur français du club, s’en plaignait dans le Midi Olympique en 2017 : « 70 % du groupe ne parle pas ma langue et les mecs qui sont là depuis deux ans, esquissent à peine deux mots de français. J’aurais dû aller jouer à l’étranger, comme ça, j’aurais su pourquoi c’était à moi de m’adapter !  C’est la première fois dans ma carrière qu’en l’espace de deux ans, j’ai autant régressé en rugby et progressé en anglais. »

« 70 % du groupe ne parle pas ma langue. J’aurais dû aller jouer à l’étranger, comme ça, j’aurais su pourquoi c’était à moi de m’adapter !  C’est la première fois dans ma carrière qu’en l’espace de deux ans, j’ai autant régressé en rugby et progressé en anglais ! »

Passage de l’ère anglophone à l’ère française

L’argument fut entendu par Altrad. Plus de Français et moins de Sud-Africains ont été recrutés, dont la clé a été Guilhem Guirado, arrivé en provenance de Toulon au début de la saison 2019-20. Vainqueur du Top 14 avec Perpignan, et vainqueur de la Champions Cup avec Toulon, le joueur alors âgé de 33 ans a apporté à Montpellier son expérience, son envie et sa fierté. Ça a déteint sur les jeunes Français de l’équipe, comme Anthony Bouthier, Yacouba Camara, Arthur Vincent et Mohamed Haouas.

Le passage de l’ère anglophone à l’ère française a pris du temps et le jeune Garbajosa n’était pas l’entraîneur idéal pour mener Montpellier sur la voie de la transformation. « Il est arrivé avec un projet de jeu ambitieux, très expansif, mais ça n’a pas pris parce qu’il avait encore l’effectif des entraîneurs précédents, qui pratiquaient un jeu plus fermé », observait Julien Tomas, l’ancien demi de mêlée montpelliérain qui a fait partie du staff du club de 2018 à 2020.

ADVERTISEMENT

Saint-André avait laissé du temps à Garbajosa pour essayer de développer son rugby, mais c’est finalement Altrad qui a pris la décision de le relever de ses fonctions en janvier 2021. « Le potentiel est là, l’équipe est bonne, mais je ne vois pas de système de jeu », avait-il alors confié. « Quand j’assiste à l’entraînement, je ne comprends pas toujours ce qu’il s’y passe. Il s’agit de faire le plus de passes au large, mais il n’y a pas d’efficacité, pas d’assise, pas assez de puissance devant. On nous critiquait quand on marquait en force avec les avants mais là, j’aimerais voir une animation offensive. »

La belle ère Saint-André

Saint-André et sa nouvelle équipe d’entraîneurs, composée de Jean-Baptiste Elissalde et d’Olivier Azam, sont aux commandes pour la saison 2021-22, et parmi les nouveaux visages de l’équipe se trouvent trois personnes qui exerceront une influence significative : le centre français vétéran Geoffrey Doumayrou, le demi d’ouverture italien Paolo Garbisi et le numéro huit anglais Zach Mercer.

Saint-Andre Montpellier statement
Philippe Saint-André fête son titre avec Montpellier (Photo par Franck Fife/AFP via Getty Images)

La force de Saint-André a toujours été de repérer les joueurs qui conviennent à ses équipes ; il l’a fait à Toulon, où il a recruté, entre autres, Jonny Wilkinson et Bakkies Botha, alors que de nombreux commentateurs pensaient que les blessures avaient eu raison d’eux. Il a recruté Mercer parce qu’il pensait que son rugby était adapté au Top 14.

Et il avait raison. Mercer a été la force physique d’une équipe montpelliéraine qui a remporté le titre du Top 14 en 2022, complétant la force émotionnelle apportée par Guilhem Guirado. À la veille de la finale contre Castres, le journal Le Monde dressait le portrait de Montpellier sous le titre : « Ancien ‘club de mercenaires’ du rugby, Montpellier s’est réinventé ».

ADVERTISEMENT

Parmi les témoins cités dans l’article, Thomas, qui a joué pour le club à l’époque d’Altrad, se réjouissait. « Des efforts ont été faits en amont, le club a retrouvé son ADN », disait-il. « Avant, le club se fichait de la formation, chaque problème était compensé par un recrutement. »

L’ancien international français devenu commentateur Maxime Mermoz ajoutait : « Quand je regarde l’effectif, je vois une équipe pleine de leaders et ça change du passé. Quelqu’un comme Guirado ne va pas beaucoup parler, mais il va montrer l’exemple ».

La chute

Montpellier ne s’est pas reposé longtemps au sommet du rugby français. Guirado a pris sa retraite et l’équipe a été perturbée par des controverses en dehors du terrain, notamment l’arrestation de Mohamed Haouas pour violences conjugales et le procès et la condamnation pour corruption d’Altrad dans une affaire qui a fait la une des journaux du monde entier.

Mohed Altrad a été condamné à une peine avec sursis, tout comme son coaccusé, Bernard Laporte, qui a toutefois été contraint de démissionner de son poste de président de la FFR. « Bernie le Dingue » n’est pas resté longtemps sur le banc des accusés : Altrad l’a choisi pour remplacer Saint-André au poste de directeur du rugby de Montpellier.

Jusqu’à présent, il n’a pas réussi. Patrice Collazo non plus.

Laporte trial report
Bernard Laporte et Mohed Altrad (Photo par Franck Fife/AFP via Getty Images)

En novembre, j’ai dit qu’il serait surprenant que Collazo aille jusqu’au bout de son contrat de 18 mois. Si Montpellier est contraint de subir l’humiliation de jouer le deuxième de ProD2 en match de barrage de relégation (Oyonnax semble condamné à la relégation automatique), on voit mal comment Altrad pourrait justifier le maintien de Collazo. Cela impliquerait un nouvel entraîneur principal, le huitième en treize saisons depuis que Altrad est le président.

Comme l’a prouvé Toulouse dans l’ère professionnelle avec ses deux entraîneurs, la continuité crée l’écosystème de la réussite. Il en va de même dans le football, comme l’ont démontré Sir Alex Ferguson à Manchester United et Pep Guardiola à Manchester City.

La loyauté, selon Altrad

Altrad est devenu milliardaire après avoir fondé une société d’échafaudages dans les années 1980. En 2015, il a été reconnu entrepreneur mondial de l’année. Interrogé par la BBC sur le secret de sa réussite commerciale, Altrad avait répondu : « La tendance générale des grands groupes comme le nôtre est de remodeler [les entreprises qu’ils reprennent] et de les rendre plus ou moins standard. Cela va absolument à l’encontre de mon concept. »

Son concept, expliquait-il, est de conserver l’identité des entreprises qu’il rachète afin que les travailleurs se sentent encore loyaux.

Ce n’est pas un principe qu’il applique à son club de rugby. Depuis qu’il est aux commandes, Altrad a remodelé Montpellier un nombre incalculable de fois, engageant et renvoyant des entraîneurs et faisant peu de cas de l’identité de l’équipe.

Ce n’est peut-être pas d’un nouvel entraîneur dont Montpellier a besoin, mais d’un nouveau propriétaire.

ADVERTISEMENT

LIVE

{{item.title}}

Trending on RugbyPass

Commentaires

0 Comments
Soyez le premier à commenter...

Inscrivez-vous gratuitement et dites-nous ce que vous en pensez vraiment !

Inscription gratuite
ADVERTISEMENT

Latest Features

Comments on RugbyPass

J
JW 3 hours ago
Does South Africa have a future in European competition?

I had a look at the wiki article again, it's all terribly old data (not that I'd see reason for much change in the case of SA).

Number Of Clubs:

1526

Registered+Unregistered Players:

651146

Number of Referees:

3460

Pre-teen Male Players:

320842

Pre-teen Female Player:

4522

Teen Male Player:

199213

Teen Female Player:

4906

Senior Male Player:

113174

Senior Female Player:

8489

Total Male Player:

633229

Total Female Player:

17917


So looking for something new as were more concerned with adults specifically, so I had a look at their EOY Financial Review.

The total number of clubs remains consistent, with a marginal increase of 1% from 1,161 to 1,167. 8.1.

A comparative analysis of verified data for 2022 and 2023 highlights a marginal decline of 1% in the number of female players, declining from 6,801 to 6,723. Additionally, the total number of players demonstrates an 8% decrease, dropping from 96,172 to 88,828.

So 80k+ adult males (down from 113k), but I'm not really sure when youth are involved with SAn clubs, or if that data is for some reason not being referenced/included. 300k male students however (200k in old wiki data).


https://resources.world.rugby/worldrugby/document/2020/07/28/212ed9cf-cd61-4fa3-b9d4-9f0d5fb61116/P56-57-Participation-Map_v3.pdf has France at 250k registered but https://presse-europe1-fr.translate.goog/exclu-europe-1-le-top-10-des-sports-les-plus-pratiques-en-france-en-2022/?_x_tr_sl=auto&_x_tr_tl=en&_x_tr_hl=en&_x_tr_pto=wapp has them back up at 300k registered.


The French number likely Students + Club, but everyone collects data different I reckon. In that WR pdf for instance a lot of the major nations have a heavily registered setup, were as a nation like England can penetrate into a lot more schools to run camps and include them in the reach of rugby. For instance the SARU release says only 29% of schools are reached by proper rugby programs, where as the 2million English number would be through a much much higer penetration I'd imagine. Which is thanks to schools having the ability to involve themselves in programs more than anything.


In any case, I don't think you need to be concerned with the numbers, whether they are 300 or 88k, there is obviously a big enough following for their pro scenes already to have enough quality players for a 10/12 team competition. They appear ibgger than France but I don't really by the lower English numbers going around.

202 Go to comments
LONG READ
LONG READ 'Springbok Galacticos can't go it alone for trophy-hunting Sharks' 'Springbok Galacticos can't go it alone for trophy-hunting Sharks'
Search