Si l’Irlande a perdu le Six Nations, c’est qu’elle n’a pas su s’adapter aux nouvelles règles
C’est face à la France que l’Irlande est passée à côté de l’histoire. En remportant la victoire, et en espérant faire de même en Italie la semaine suivante, le XV du Trèfle serait devenu la première nation à remporter trois Tournois des Six Nations consécutifs.
L’Irlande n’a dû se contenter que de la Triple Couronne pour redorer une campagne mitigée finalement conclue à la troisième place, à deux points de la France.
Selon Bernard Jackman, ancien talonneur irlandais international (9 sélections) et ancien coach du FC Grenoble (2011-2017), la raison de l’échec est à rechercher dans les changements de règles imposés par la fédération internationale que l’Irlande n’a pas su vraiment prendre à son compte.
« World Rugby n’a jamais été aussi ambitieux ou radical dans sa manière de retoucher les règles. La motivation est claire : rendre le jeu plus rapide, plus spectaculaire et plus sûr — tout ça à la fois », écrit-il dans sa chronique pour l’Irish Independent sous le titre : « La taille importe moins car les nouvelles règles favorisent la vitesse et la domination aérienne
».
Jackman commence par souligner que le jeu au pied reste présent, mais son usage a évolué : les duels aériens sont redevenus centraux grâce à une meilleure application des règles sur les lignes de soutien et d’escorte.
Un recul dans le jeu aérien
« Avant, les joueurs étaient tellement performants dans ce rôle d’escorte qu’il devenait presque impossible d’avoir un véritable duel dans les airs. Ceux qui n’étaient pas à l’aise sur les ballons hauts voyaient cette faiblesse masquée. Mais aujourd’hui, avec le risque de concéder une pénalité bête, les joueurs qui reculent laissent plus volontiers les chasseurs de ballon foncer sans obstacle. Résultat : on assiste à de superbes duels aériens, souvent suivis de turnovers qui viennent casser le rythme du match et désorganiser les défenses. »
Mais selon lui, l’Irlande a reculé dans ce domaine : « On semble aujourd’hui moins à l’aise dans les airs qu’on ne l’était autrefois. On n’est pas l’équipe la plus instinctive, ni la plus dangereuse en jeu déstructuré. C’est donc un secteur qui devrait attirer toute l’attention d’Andy Farrell à son retour de sa parenthèse avec les Lions. »
D’ailleurs, Jackman cite l’arrivée de Brian Fenton, ex-footballeur gaélique, pour travailler les réceptions comme un signe que l’Irlande cherche à combler ce retard.
La nouvelle force du banc et des joueurs hybrides
Jackman aborde aussi la question des bancs en 6-2 ou 7-1, de plus en plus courants chez les grandes nations : « Certaines nations sont mieux armées pour jouer en 6-2 ou 7-1. » Il note que la France n’hésite pas à « vider son banc autour de la 45e minute », un choix stratégique qui a payé contre l’Italie, l’Irlande et l’Écosse.
Il salue également l’émergence de joueurs hybrides à l’image du troisième-ligne Oscar Jegou repositionné au centre contre l’Irlande, par la force des choses. « Ce sont l’accélération et les appuis qui font la différence, bien plus que les kilos ou les centimètres », insiste celui qui est passé consultant.
En conclusion, Jackman estime que l’Irlande doit s’adapter si elle veut exister dans le rugby moderne : « On n’a pas encore de vrais profils hybrides ni assez de profondeur devant pour jouer en 6-2 ou 7-1, mais ça peut – et ça va – se développer. »
Et il fixe l’objectif : « On a deux ans pour préparer notre groupe pour la prochaine Coupe du monde. Si on veut y briller, il faudra coller aux nouvelles tendances du rugby mondial. »
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