Stade Toulousain - Bordeaux-Bègles, la finale que tout le monde voulait

Par Jérémy Fahner
La dernière rencontre entre Bordeaux-Bègles et Toulouse, le 24 mars, avait été l'une des plus belles de la saison de Top 14. L'UBB avait gagné 31-28 (Photo by ROMAIN PERROCHEAU/AFP via Getty Images).

Le derby de la Garonne s’invite au sommet du Top 14. Stade Toulousain – Union Bordeaux-Bègles, c’est donc la finale du Championnat de France de rugby à XV, qui se tiendra vendredi 28 juin à Marseille (coup d’envoi 21h05).

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Cette affiche entre le premier de la phase régulière (Toulouse) et le 3e (l’UBB) ressemble un peu à la finale de rêve, sans manquer de respect aux autres clubs, notamment les battus des demi-finales (La Rochelle et le Stade Français, 2e de la saison régulière.

Rencontre
Top 14
Toulouse
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« Ce sont les deux équipes qui ont affiché la plus belle qualité de jeu, le jeu le plus spectaculaire qui se retrouvent au bout », juge l’ancien ouvreur international François Gelez, interrogé par RugbyPass.

« Sur ce qu’elles ont montré tout au long de la saison, il y a une certaine logique à les retrouver au bout », estime également le talonneur aux 74 sélections en Bleu, Guilhem Guirado.

Des propos corroborés par les chiffres : Toulouse et Bordeaux-Bègles, ce sont deux des trois meilleures attaques du championnat, deux des trois équipes qui cassent le plus de plaquages, les deux plus performantes en matière d’essais marqués, de franchissements, de mètres parcourus…

Pourrait-on assister, à l’image du dernier affrontement en date entre les deux équipes, à une finale débridée ? L’idée fait sourire l’ancien capitaine de l’équipe de France : « J’aimerais bien, mais je ne pense pas ».

Le 21 mars 2024, l’UBB avait en effet battu le Stade Toulousain (31-28) au terme d’un match complètement fou. Cinq essais à quatre, du jeu à tout va, une remontada toulousaine portée par Antoine Dupont, entré à la pause après son premier intérim Sevens, finalement vaine à cause du dernier essai bordelais.

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Une parenthèse enchantée qui avait ravi tous les amoureux du ballon ovale, comme François Gelez. « Je me régale de manière générale à regarder le Top 14, mais là, cela faisait longtemps que je ne m’étais pas autant régalé. On comprend pourquoi le Top 14 est le championnat le plus attractif au monde », s’enthousiasme l’ancien Agenais.

« Depuis ce match, je me dis, et je pense que je ne suis pas le seul, que ça serait beau d’avoir une finale avec les deux équipes les plus spectaculaires, les Penaud, Jalibert, Dupont, Ntamack… C’est ce que les gens ont envie de voir, c’est donc le bel aboutissement d’une superbe saison. »

Guirado : « Difficile de reproduire ce genre de match, il faut s’attendre à plus de pied, plus de stratégie et moins de fougue »

« Ça sera difficile de reproduire ce genre de match », prévient toutefois Guirado, cinq finales et deux Brennus au compteur. « Il faut s’attendre à un peu plus de jeu au pied, de stratégie et un peu moins de fougue et d’emballement sur les lignes arrière. C’est compliqué, il y a quand même un enjeu fort, beaucoup de tension. La finale se joue à Marseille pour la première fois, un terrain où les joueurs ont peu de repères donc il y a tout ça à prendre en compte ».

D’autant que ces deux équipes aux lignes de trois-quarts sont quand même dotées d’un pack qui fait plus que tenir la route. Demandez aux Parisiens, qui pensaient pouvoir appuyer sur la solidité de sa conquête pour dominer la demi-finale face à l’UBB. À l’arrivée, les Unionistes ont marqué deux de leurs trois essais sur ballon porté, montrant leur capacité d’adaptation.

« Devant, ils n’ont pas des manches ! C’est vrai qu’ils s’appuyaient beaucoup sur la ligne de trois-quarts qui leur amenaient beaucoup de points, donc ils n’ont pas forcément basé leur jeu offensif sur la puissance de leur paquet d’avants », poursuit Gelez. « Ils ont montré ce week-end qu’ils étaient capables de faire aussi bien que les autres équipes s’ils le souhaitaient ».

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À l’inverse, le Tyrossais pointe une faille dans le blindage toulousain. En demi-finale face à La Rochelle, « On peut considérer que Toulouse, jusqu’à la 50e, a été inquiété, voire inquiétant, sur la puissance de son paquet d’avants. C’est un peu le cas depuis qu’ils ont perdu tout leur axe droit par rapport au début de saison. Idéalement, ils auraient joué avec Laulala et Meafou », qui apportent stabilité et force à l’édifice.

L’UBB pourrait bien elle aussi être contrainte de se passer de l’un de ses facteurs X, Ben Tameifuna, touché à l’épaule. Ce qui ne serait pas sans conséquence, imagine Gelez : « C’est l’un de leurs super pouvoirs sur la mêlée et sur la puissance quand il porte le ballon. On voit les trois-quarts briller, mais un joueur comme lui fait beaucoup de travail sur le jeu au près, les relances de jeu. Sa présence sera l’une des clés. »

Gelez : « Il y a de quoi faire quelque chose qui va marquer les esprits »

Pourrait-elle inciter Yannick Bru, le manager bordelais, à déplacer l’affrontement des lignes de trois-quarts, « les deux meilleures de France » dixit Gelez, aux avants ? Il y a un pas que Guilhem Guirado ne souhaite pas franchir.

« Toulouse est quand même bien équipé et costaud devant, donc attention à ne pas trop jouer à ce jeu-là. Il faudra surtout être déterminé en défense, être au rendez-vous. On l’a vu l’année dernière, La Rochelle pensait tenir le match et sur un éclair, ils l’ont perdu. Il faut faire le match parfait, c’est dur à atteindre en finale, mais les Bordelais ont de quoi le faire. »

« Peut-être que le match sera pourri car les deux équipes auront peur des attaques adverses », redoute François Gelez. « Mais en tout cas on peut imaginer quand même qu’avec ces joueurs-là, il y a de quoi faire quelque chose qui va marquer les esprits, à l’image de l’essai de Ntamack l’année dernière ».

Guilhem Guirado (en haut) a soulevé deux fois le Brennus, dont en 2022 avec Montpellier pour le dernier match de sa carrière (Photo by FRANCK FIFE/AFP via Getty Images).

Gelez, finaliste malheureux du championnat en 2002, battu avec Agen par Biarritz, s’interroge : « Si j’étais Bordeaux, est-ce que j’aurais envie d’aller dans les filières de jeu préférentielles de Toulouse, ou d’aller à contrecourant de ce qui a été fait dans l’année, avec une stratégie basée sur le jeu d’avants et le jeu au pied ? »

La vérité se trouve sans doute entre les deux, avec plus de jeu au pied qu’à l’accoutumée, et un minutieux choix des ballons à exploiter à la main. À ce petit jeu, les deux équipes sont bien armées, même si l’absence de Matthieu Jalibert, si elle est confirmée, prive l’UBB d’un artilleur de luxe.

« Le Stade Toulousain trie les ballons à la volée. S’ils décident de s’en séparer, ils ont un jeu d’occupation assez impressionnant avec (Blair) Kinghorn, Thomas Ramos, Romain (Ntamack) et Antoine (Dupont). Ça leur permet de sortir à chaque fois de leur zone des 40 m, qui peut être vulnérable », observe le Catalan.

Gelez acquiesce : « Là où les Toulousains sont forts, c’est qu’ils ont la possibilité de ne jouer que les bons ballons. Les mauvais ballons, ils ne les jouent pas. Pour les obliger à jouer des ballons un peu moyens, il faut être capable de prendre les devants et les obliger à sortir de leurs schémas, à prendre des risques inhabituels. »

François Gelez a disputé (et perdu) la finale du championnat de France 2002 avec Agen, contre Biarritz (Photo by JEAN-PIERRE MULLER/AFP via Getty Images).

Pour cela, l’UBB n’aura pas le choix. Elle devra réussir son début de match, empêcher les « rouge et noir » de s’installer dans le match, les sortir de leur zone de confiance. Et de la confiance, les Toulousains en ont à revendre, engrangée au fil des succès.

Toulouse depuis 2008 : neuf finales, neuf victoires

La dernière défaite en finale du club haut-garonnais remonte à… 2008 (défaite 13-16 contre le Munster en coupe d’Europe). Depuis, ils ont remporté neuf titres (six nationaux, trois continentaux) en autant de finales !

C’est dire l’ampleur de la tâche des Bordelo-Béglais, novices à ce niveau après trois échecs consécutifs en demi-finale. Avoir enfin franchi ce cap est à double tranchant : certains sont transcendés par l’événement, quand d’autres décompressent inconsciemment.

« De samedi à vendredi, il y a eu peu de temps pour se préparer, et donc encore moins pour décompresser », estime le champion de France 2009 (USAP) et 2022 (MHR). « Je les imagine plutôt dans l’excitation. »

François Gelez est moins catégorique. « Le bémol que je mets, c’est sur l’impression que l’aboutissement pour eux, c’était de gagner la demie. Qu’une fois qualifiés pour la finale, ils étaient contents et qu’ils se sont dit “on va voir, on verra” ».

Et l’ancien ouvreur d’envisager un scénario : « Si Toulouse commence bien le match, prend le score, je pense que les Béglais auront du mal à revenir. Dans ces cas-là, il faut que l’équipe considérée comme outsider ne laisse pas partir trop vite l’adversaire. Le premier quart d’heure ne fera pas gagner l’UBB, mais il peut la faire perdre. »

Alors, premier Brennus pour une UBB novice mais gourmande, ou 23e pour un Stade Toulousain qui fait festin sur festin ? Réponse vendredi vers 23h après, on l’espère, une finale à la hauteur des attentes qu’elle suscite.


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