Toulouse semble à bout de souffle. Le club qui avait marché sur la phase de poules de la Champions Cup en infligeant 60 points à Exeter et à l’Ulster, puis 80 à Leicester, a peiné face à Sale et Toulon en phase finale. Champion en titre, le Stade Toulousain a dû attendre la dernière minute pour écarter Toulon grâce à une pénalité de Thomas Ramos (21-18). Ugo Mola a salué le « caractère » et la « résilience incroyable » de ses joueurs, tout en reconnaissant que « ça ne suffira pas » contre Bordeaux, en demi-finale le 4 mai.
Dans le paquet d’avants, Emmanuel Meafou, François Cros et Alexandre Roumat ont tenu leur rang, mais le reste de l’équipe a semblé, disons, emprunté. Indiscipline (14 pénalités concédées), maladresses (trois lancers perdus en touche), et un Ramos inhabituellement imprécis au pied jusqu’à son coup de grâce final. Pire encore : derrière, c’était la panne d’inspiration. L’absence d’Antoine Dupont, blessé, s’est fait cruellement ressentir.

Julien Marchand ne l’a pas caché après la rencontre : « On ne peut pas banaliser le fait qu’Antoine a apporté énormément de choses dans l’équipe, que ce soit sur le terrain, en dehors, ou sur le rugby parce que c’est quelqu’un qui est très précis, très exigeant. Il arrive à nous transcender de temps en temps mais je pense que ça y est c’est passé, ça fait déjà plus d’un mois qu’il est blessé, on a «switché» aussi. »
Fabien Galthié lui-même disait en début d’année que Dupont « porte une aura qui transcende l’équipe de France ». Sa capacité à garder le ballon vivant, à battre des défenseurs dans un mouchoir de poche, à tenter des coups de n’importe où, en fait un joueur unique. Toulouse a bâti tout son système autour de lui, avec des avants puissants qui avancent pour créer de l’espace à son profit. Pourquoi déployer le ballon quand on a Dupont pour créer le danger en première main ?
Quand il est là, les défenses ont toujours un œil sur lui. Richard Wigglesworth, ancien demi de mêlée et actuel coach de l’attaque anglaise, résume bien le phénomène : « Il ne se fait presque jamais plaquer, le ballon ne s’arrête jamais. Il jaillit, élimine trois mecs et tape un coup de pied rasant. Ou alors il te raffute d’un bras et le jeu continue. »
« Il ne se fait presque jamais plaquer, le ballon ne s’arrête jamais. Il jaillit, élimine trois mecs et tape un coup de pied rasant. Ou alors il te raffute d’un bras et le jeu continue. »
Le seul autre joueur capable d’apporter un peu de magie, c’est Ange Capuozzo. Mais l’Italien, en grande forme, s’est blessé au genou en inscrivant un essai magnifique contre Sale. Derrière, il reste du talent — Kinghorn, Ramos — mais pas la même vitesse ni la même imprévisibilité. Quant à Ntamack, de retour après une rupture du ligament croisé, il a admis dans une interview récente qu’il ressent encore une gêne au genou et envisage une opération cet été.
Mola a eu raison de souligner le courage de ses hommes face à Toulon, mais il sait aussi que ce ne sera pas suffisant contre Bordeaux. Les Girondins, eux, avancent fort. Penaud, Bielle-Biarrey, Lucu, Jalibert forment une ligne de trois-quarts redoutable, et le paquet d’avants emmené par Petti, Diaby et Samu a dominé le Munster dans l’engagement et l’intensité.

Face à cela, le pack toulousain a montré ses limites. Marchand évoquait déjà après Sale le besoin d’être plus propres et plus rapides dans les zones de ruck : « on avait envie de faire des choses correctement, proprement et on sait qu’il faut mettre de l’intensité donc quand tu mets trop d’intensité, des fois tu passes un petit peu à côté », disait-il. Rien n’a changé contre Toulon. Même Jack Willis, d’ordinaire irréprochable, a été pénalisé deux fois et dominé dans le combat.
Pendant ce temps, le rouleau compresseur Leinster avance tranquillement : Harlequins balayés, Glasgow écrasé, et un quart de finale à domicile assuré en URC. Pendant que Bordeaux et Toulouse luttent pour rester dans le top 2 du Top 14 et éviter les barrages, les Irlandais peuvent souffler.
Mais attention : il reste dix semaines dans la saison. Toulouse a déjà su monter en puissance au bon moment. Alors, coup de pompe passager ou vraie dépendance à Dupont ? Réponse dans les semaines à venir.
Cet article publié initialement sur RugbyPass.com a été adapté en français par Willy Billiard.
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