5 souvenirs du Six Nations gravés dans la mémoire des Bleus
Alors que le Tournoi des Six Nations masculin touche à sa fin, RugbyPass revient sur les moments les plus marquants et insolites de la compétition, 25 ans après l’élargissement du Tournoi des Cinq Nations.
Avec les contributions de Bryn Palmer (BP) et Neil Squires (NS), voici cinq moments mémorables du XV de France.
La fois où les Bleus ont décroché enfin un Grand Chelem après 12 ans d’attente

La première décennie du Tournoi des Six Nations a suivi la même dynamique que l’ancien Tournoi des Cinq Nations : une France dominatrice, ajoutant cinq titres à son palmarès en onze ans, dont trois Grands Chelems (2002, 2004 et 2010).
Puis, plus rien. De flamboyante, l’équipe de France est devenue laborieuse, terminant sept fois dans la deuxième moitié du classement entre 2011 et 2019, avec une humiliante cuillère de bois en 2013.
Mais une génération brillante – Antoine Dupont, Romain Ntamack, Damian Penaud, Grégory Alldritt – a redonné des couleurs au XV de France, sous l’impulsion d’un Fabien Galthié stratège et d’un Shaun Edwards maître d’œuvre d’une défense de fer.
Deux fois seconds en 2020 et 2021, les Bleus ont enfin décroché leur premier titre en 12 ans, avec des victoires marquantes : un affrontement titanesque remporté 30-24 face à l’Irlande et une démonstration de force à Murrayfield (36-17 contre l’Écosse), avant l’apothéose à Paris. Dans un Stade de France en fusion, ils ont validé leur Grand Chelem en dominant l’Angleterre 25-13.
Comme un symbole, Antoine Dupont a inscrit l’essai du break à l’heure de jeu, assurant une fin de match sans frayeur. La Marseillaise a résonné, Alldritt a envoyé le ballon en tribunes, et les Bleus ont enfin mis fin à plus d’une décennie de frustration dans le Tournoi. BP
La fois où Antoine Dupont a défié la gravité en stoppant net Mack Hansen
Les skills d’Antoine Dupont font de lui une légende du rugby moderne, mais lors du Tournoi des Six Nations 2023, il a rappelé qu’il était bien plus qu’un simple magicien du ballon.
À Dublin, dans un choc déjà décisif pour le titre dès la deuxième journée, l’Irlande menait 19-16 et semblait sur le point d’inscrire un quatrième essai avant la pause. Hugo Keenan, lancé sur l’aile droite, a poussé un coup de pied rasant vers l’en-but français. Ni lui ni Thomas Ramos n’ont pu s’en emparer, laissant le ballon à la merci de Mack Hansen, qui n’avait plus qu’à plonger à un mètre de la ligne.
Mais il n’avait pas anticipé l’intervention surnaturelle d’Antoine Dupont. Malgré ses 14 centimètres et 6 kilos de moins, le demi de mêlée a planté ses appuis et, les mains fermement accrochées à la taille du surpuissant ailier irlandais, l’a maintenu en l’air, empêchant son essai, avant de l’escorter calmement vers la touche. Un arrêt aussi spectaculaire qu’improbable, qui a laissé les commentateurs sans voix : « C’est presque impossible ! »
Mais avec Dupont, l’impossible n’existe pas. BP
La fois où Jules Plisson s’est pris un missile plein axe
L’Angleterre devait l’emporter de 26 points contre la France lors de la dernière journée du Tournoi des Six Nations 2015 (les Anglais gagneront finalement 55-35). Malgré un essai inscrit dès la première minute, le XV de la Rose se retrouvait pourtant mené 15-7 à la 25e.
C’est à ce moment que Courtney Lawes a décidé de secouer la rencontre… et Jules Plisson avec. Sur une mêlée rompue à hauteur de la ligne médiane, le colosse anglais a jailli hors de la défense comme un missile téléguidé, verrouillant le jeune ouvreur français dans sa ligne de mire.
L’impact fut aussi brutal que spectaculaire. Plisson a été littéralement broyé, emporté comme une feuille sous la rafale. « Plaquage réglementaire… le timing était bon », a immédiatement statué l’arbitre Nigel Owens, malgré les regards interloqués.
Le ralenti a figé la scène : une collision digne d’un carambolage, Twickenham suspendu au souffle coupé de Plisson, recroquevillé au sol. La charge de Lawes a aussitôt déclenché une mini-bagarre, quatre Français fonçant pour en découdre pendant que le jeu continuait. Owens, imperturbable, a revu l’action et confirmé son premier verdict : tout était légal.
Plisson, sonné mais valeureux, a repris le jeu après quelques soins, prenant toutefois soin de garder ses distances avec son bourreau du jour. NS
La fois où Jason Robinson a fait jouer ses appuis
Y a-t-il plus beau spectacle pour un supporter anglais que Jason Robinson défiant les lois de la physique avec ses appuis dévastateurs ?
Son jeu de jambes – une lévitation presque irréelle suivie d’un changement de direction éclair et d’une accélération foudroyante – était une pure merveille. Pas étonnant qu’il ait hérité du surnom de « Billy Whizz » à XIII.
Au Stade de France en 2002, son chef-d’œuvre a éclaté au grand jour. Premier receveur d’une mêlée dans les 22 mètres français, Robinson a mystifié trois défenseurs en un seul mouvement, avant de glisser vers l’en-but sans qu’aucun Bleu ne puisse ne serait-ce que l’effleurer.
« Oh là là… », s’est exclamé un commentateur médusé. Et pour cause. Ce bijou n’était que l’un de ses quatre essais lors de ce Tournoi, un total qu’il égalera en 2007.
Cela n’a pas suffi à l’Angleterre pour éviter la défaite (20-15) ni pour priver la France de son Grand Chelem, mais les supporters du XV de la Rose n’ont pas eu à attendre longtemps pour voir Robinson leur offrir un bonheur encore plus grand, un an plus tard, à Sydney. NS
La fois où Anthony Bouthier a enflammé le Stade de France après un tir de 90 mètres
Anthony Bouthier n’a porté le maillot bleu que huit fois, mais il n’a pas eu besoin de plus pour marquer les esprits. Lors de son tout premier match du Tournoi des Six Nations, en 2020 contre l’Angleterre, l’arrière français a signé un geste d’anthologie.
La France menait 17-0 après 26 minutes quand Kyle Sinckler perdit le ballon dans les 22 tricolores. Julien Marchand s’en empara avant de transmettre à Bouthier. Debout à un mètre de sa propre ligne d’en-but, le joueur montpelliérain arma son pied droit et décocha un coup de pied monumental qui allait devenir… « le meilleur coup de pied de dégagement de l’histoire du Six Nations ».
Le ballon rebondit une première fois à cinq mètres des 22 anglais, poursuivit sa trajectoire vers la touche et, au sixième rebond, finit sa course à sept ou huit mètres de la ligne d’en-but anglaise. George Ford, en couverture, se pencha désespérément pour l’arrêter… en vain.
Aujourd’hui, un 50:22 aurait peut-être surpassé cet exploit, mais à l’époque, le Stade de France ne s’y trompa pas. Dans un brouhaha d’incrédulité, des milliers de supporters se levèrent pour ovationner ce coup de pied de 90 mètres. Ils venaient de voir quelque chose de rare, d’exceptionnel, d’inoubliable. BP
Cet article, publié à l’origine sur RugbyPass, a été adapté en français par Willy Billiard.
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