Black Ferns : à quel point la bête est-elle blessée ?
Le match final des Bleues dans le WXV 1 samedi 12 octobre s’annonce épicé. Face à elles, une autre bête blessée, la Nouvelle-Zélande.
Si la France peut relever – un tout petit peu – la tête à la suite de sa victoire sur les USA (14-22) que suivait une défaite cinglante contre le Canada (46-24), il n’en est pas de même pour la Nouvelle-Zélande qui a encaissé une deuxième défaite en autant de matchs.
Au soir de la première fessée contre l’Irlande (27-29), on évoquait un accident de parcours. Or, la semaine suivante, deuxième fessée, plus sévère, contre l’Angleterre (31-49).
Jamais encore les Néo-Z. n’avaient encaissé autant d’essais (9). Cette défaite est également la deuxième plus lourde de leur histoire (toujours face à l’Angleterre).
Que se passe-t-il pour les championnes du monde en titre (depuis 2022) qui ont si longtemps régné sur le classement mondial féminin avant de se faire déloger par les Red Roses depuis quelques années ?
L’Angleterre a joué à « la néo-zélandaise »
Lors de cette rencontre à Langley, l’Angleterre a semblé au-dessus du lot, jouant à « la néo-zélandaise » en mettant du rythme et en envoyant ses trois-quarts marquer – sept des neuf essais.
Les avants ont fait le job, dominant la mêlée noire, perturbant leurs connexions, récupérant un nombre maximal de ballons.
Déjà sous le coup d’une défaite surprise face à l’Irlande en ouverture, l’entraîneur Allan Bunting (ancien entraîneur de l’équipe féminine à 7) avait pourtant décidé de reconduire son équipe (un seul changement sur le banc pour blessure). De lui redonner une seconde chance.
Les sélectionneurs français Gaëlle Mignot et David Ortiz avaient fait la même chose à la différence que les Françaises ont réussi leur coup, contrairement aux Néo-Zélandaises qui se sont pris un deuxième coup sur la tête.
Là où ça a pêché pour Bunting, c’est qu’en conservant les mêmes joueuses, il ne les a pas fait jouer là où elles avaient leurs habitudes. Ainsi, mise à part toute la première ligne qui a été changée (les remplaçantes sont devenues titulaires), la numéro 8 Liana Mikaele-Tu’u a été repositionnée deuxième-ligne, la capitaine Ruahei Demant est devenue premier centre, décalant Sylvia Brunt deuxième centre, et la charnière a encore changé.
Une équipe encore en construction
Son équipe est encore jeune à l’image de la charnière Maia Joseph (22 ans) et Hannah King (20 ans, 6 sélections), comme de Ruby Tui (pourtant si excellente à sept). Joseph s’est d’ailleurs particulièrement illustrée par la lenteur de ses sorties de ruck, empêchant ses avants d’être efficaces.
En conférence de presse d’après-match, Bunting, d’un naturel positif et patient, avait tenu à soutenir ses filles arguant qu’elles étaient encore jeunes et qu’elles apprenaient, que c’est en engrangeant de l’expérience qu’elles y arriveront. Mais dans un pays où règle la culture de la gagne, les supporters ne sont pas habitués à attendre.
« Si vous regardez certaines de nos joueuses, Katelyn [Vahaakolo] par exemple, elle ne joue au rugby que depuis deux ans. Elle apprend, elle est très bonne sur nos extérieurs et Ruby [Tui] joue depuis un petit moment, mais cela fait trois ans qu’elle n’a pas joué à XV », soutenait-il.
Sans parler des joueuses expérimentées qui n’ont pas été sélectionnées sur ce WXV 1, la Nouvelle-Zélande a pourtant dans ses rangs actuels de vraies pépites telles que la numéro 8 Kaipo Olsen-Baker (qui avait ouvert le score) ou l’ailière Ayesha Leti-l’iga (auteure d’un essai).
Quasiment autant de matchs que les Françaises
L’Angleterre semble invincible avec 49 victoires en 50 matchs ; leur seule défaite depuis juillet 2019 étant contre les Black Ferns en finale de la Coupe du Monde de Rugby jouée en 2022 en Nouvelle-Zélande. Depuis, les Anglaises n’ont jamais connu la défaite !
En termes de temps de jeu, les Néo-Zélandaises ont quasiment autant d’occasions de jouer au rugby international que leurs adversaires du Nord – 14 matchs depuis la dernière Coupe du Monde de Rugby en 2022 contre 16 pour la France.
Alors, comment expliquer qu’elles puissent se prendre neuf essais contre les Anglaises ?
D’accord, leur coach emblématique, leur maître Wayne Smith, celui que l’on nomme « le Professeur », n’est plus là. Pour la petite histoire, le coach actuel de l’Angleterre, le Néo-Zélandais John Mitchell, lui avait succédé en 2001 au poste de sélectionneur des All Blacks.
Une victoire de la France n’est pas à exclure
Depuis la finale de la Coupe du Monde de Rugby en 2022 (victoire 34-31 contre l’Angleterre), soit depuis que Allan Bunting a été nommé coach, la Nouvelle-Zélande a donc disputé 14 rencontres internationales, mais n’a signé que huit victoires. Six défaites dont une contre la France lors de leur seule rencontre depuis (17-18 lors du WXV 1 2023).
Dans le même temps, la France a joué 16 rencontres et a remporté la victoire à 10 reprises.
Au cas où la France gagnerait samedi 12 octobre – « sur un malentendu, ça peut peut-être marcher », comme disait feu Jean-Claude Dusse – ce ne serait pas la première fois que la Nouvelle-Zélande perd trois matchs de suite.
La fois précédente c’était en 2021 lors de leur tournée européenne où les Blacks Ferns s’étaient inclinées deux fois contre l’Angleterre et une fois contre la France. Ce qui ne les avait pas empêché d’être championnes du monde l’année suivante.
Vous voyez l’enjeu ? Blessée dans son orgueil et la tête au fond du trou, la Nouvelle-Zélande a moins de douze mois devant elle pour se remettre à l’endroit et défendre sa couronne. Rien d’impossible.