Les parents, principaux freins à la pratique du rugby féminin
Les parents redoutent d’inscrire leur fille au rugby. C’est le constat qui ressort d’une étude réalisée par Kantar pour Foncia, publiée il y a quelques jours. Concrètement, si quatre parents sur cinq (81%) se déclarent favorables à la pratique du rugby en club pour leur fils, ce chiffre tombe à 66% quand il s’agit de fille.
Cela montre que les clichés liés à la pratique du rugby ont la vie dure, en premier la supposée violence de ce sport de contact, dont l’image d’Épinal renvoie à des golgoths bodybuildés se fonçant les uns dans les autres à pleine vitesse.
Les parents sont ainsi 60% à évoquer le poids des stéréotypes pour justifier le refus d’inscrire leur fille dans un club de rugby. 20% d’entre eux estiment que leur fille n’a pas les capacités physiques pour jouer au rugby. Enfin, ils sont 30% à évoquer le manque de figures sportives inspiratrices qui pèse pour développer la pratique.
Gaëlle Mignot : « Tout le monde peut y trouver sa place »
C’est oublier que le rugby est aussi un sport d’évitement où l’on apprend avant tout à se faire des passes plutôt qu’à jouer au chamboule-tout. « Tout le monde peut y trouver sa place », rassure Gaëlle Mignot, sélectionneure de l’équipe de France féminine, interrogée en marge du match Écosse – France comptant pour le Tournoi des Six Nations.
« Le rugby transmet énormément de valeurs, est adapté à tout le monde. C’est un sport qui se prépare, forcément : pour chuter, pour encaisser des contacts. Donc c’est vrai que ça peut faire un peu peur au départ. Mais aujourd’hui, tous ceux qui l’essaient l’adoptent. »
L’étude Kantar montre que ces réticences sont souvent liées à une forme d’ignorance du jeu. Les parents ne s’intéressant pas au rugby sont en effet les plus réfractaires à sa pratique pour leurs enfants, garçon ou fille. De manière plus inattendue, les jeunes parents (25-34 ans) sont aussi plus réticents que les moins jeunes, tout comme les pères par rapport aux mères.
Conséquence directe de ces freins, les jeunes filles viennent au rugby souvent sur le tard, à l’adolescence voire au début de l’âge adulte. « En partageant les constats de l’étude avec mes coéquipières au sein du Racing 92, nous nous sommes rendu compte que très peu de joueuses avaient commencé à jouer au rugby étant enfant », confirme Jeanne Sorrin, citée dans l’étude. « C’est une pratique à laquelle nous avons eu accès tardivement et pour beaucoup dans le cadre de nos parcours en études supérieures ».
C’est le cas également d’Emilie Boulard. L’arrière de Blagnac et des Bleues a cependant eu la chance de bénéficier du soutien familial. « J’ai commencé assez tard (en 2017, alors qu’elle était étudiante en STAPS, ndlr), et mes parents n’ont jamais eu de craintes, ou en tout cas ne me les ont pas transmises ».
Pour compter un peu plus de M. et Mme Boulard chez les parents accompagnant la pratique sportive de leur fille, l’étude explore trois axes de réflexion, avec en premier lieu la nécessité absolue de susciter l’envie.
Emilie Boulard s’y colle : « On y rencontre des personnes qui nous aident à grandir en tant que joueuses et en tant que femme. Ce n’est pas plus dangereux qu’un autre sport, bien que cela reste un sport de combat comme le judo, le karaté, la lutte… Tous les éducateurs, entraîneurs, accompagnent de la meilleure des façons tous ceux qui se mettent au rugby, filles, garçons, jeunes, moins jeunes… Il y a un gros travail fait par des spécialistes, il n’y a pas de raison d’avoir peur. »
Un plaidoyer résumé par son coach en Bleue, Gaëlle Mignot :« Tentez l’expérience, osez, vous allez vivre de superbes aventures en choisissant ce sport. »