Nouvelles recrues, nouveau cycle, l’année de la rédemption pour Clermont ?
Bastion du rugby hexagonal, champion de France en 2010 et 2017, finaliste à maintes reprises du Top 14 ou de la Champions Cup, l’AS Clermont Auvergne traverse désormais une passe difficile.
Habituée à truster le haut du tableau depuis plus de quinze ans, la formation auvergnate est peu à peu rentrée dans le rang, à tel point qu’elle n’a plus disputé de phases finales de championnat depuis trois saisons. Une éternité pour ce club.
La dernière participation des Jaunards à des barrages remonte donc à la saison 2021 et une défaite à Chaban-Delmas contre l’Union Bordeaux-Bègles. Forcément, l’attente commence à être longue pour les aficionados du club.
Fini les années fastes, Clermont connait une traversée du désert. Christophe Urios, débarqué en janvier 2023 en tant que pompier de service après un début de championnat raté, a tenté, tant bien que mal, de redresser la barre. Mais la saison dernière, les Clermontois ont une nouvelle fois échoué aux portes des phases finales, à une décevante huitième place.
Un an et demi après la prise de fonction de l’ancien talonneur, l’ASM semble pourtant partir sur un nouveau cycle. L’entraîneur a pu reconstruire son effectif, faire appel à des joueurs sur qui il compte s’appuyer et dessiner les contours d’un nouveau système de jeu. Les vœux du manager clermontois ont été exaucés et tout porte à croire que cette saison peut être celle du renouveau.
Alors, on vous l’accorde, difficile au bout de seulement deux rencontres, de tirer des enseignements. Mais le premier succès contre Pau fut prometteur. Et malgré ce revers au Racing, les Auvergnats ont montré, à Créteil, des leviers sur lesquels ils pourront s’appuyer dans les prochaines semaines.
Des recrues gagnantes ?
En y regardant de plus près, l’effectif clermontois ne possède pas de réelles « stars » comme certaines formations de Top 14 peuvent compter dans leurs rangs. Mais les recrues de l’intersaison, intelligemment ciblées, ont apporté un plus dès leurs premières apparitions. Thomas Ceyte en est l’exemple.
L’ancien deuxième ligne de Bayonne, longtemps habitué aux joutes de Pro D2 durant sa carrière, a sauté le pas en 2022 et a brillé sous les couleurs basques en Top 14. Titulaire à 42 reprises sur les 49 matchs qu’il a disputés toutes compétitions confondues avec les “ciel et blanc”, le joueur de 33 ans s’était affirmé comme l’un des rouages essentiels de l’Aviron.
Étonnamment, les dirigeants bayonnais lui ont fait savoir que son contrat expirant à l’été 2024 ne serait pas prolongé, malgré le souhait du joueur de poursuivre l’aventure. Une décision incompréhensible tant le colosse (1,98 m, 120 kg) séduit à chaque apparition. L’ASM profite de l’aubaine et le fait signer.
Et grand bien en a pris aux Auvergnats. Pour sa première face à Pau, le 7 septembre dernier, Ceyte s’est distingué, d’abord sur une percée de 30 mètres plein centre qui aurait mérité meilleur sort. Jamais avare d’efforts, à la pointe du combat, il est au diapason d’un huit de devant qui domine ses adversaires depuis le début de saison.
Si les avants, grands artisans du succès contre la Section Paloise, ont brillé, derrière, et malgré le manque d’automatisme criant, certains joueurs se sont mis en évidence. C’est le cas de Lucas Tauzin ou Kylan Hamdaoui, transfuges de Toulouse et Paris. En difficulté dans leurs clubs respectifs ces derniers temps, plus forcément dans les plans de leur manager, ils ont livré une belle partie contre la Section.
Lucas Tauzin, titularisé avec le numéro 13 dans le dos, s’est montré percutant et aurait pu y aller de son essai sans un en-avant de Léon Darricarrère. Mais le plus en vue fut, sans aucun doute, Hamdaoui. L’arrière, auteur de deux très belles saisons à son arrivée au Stade Français en 2018, a peu à peu baissé en régime sur les bords de la Seine. Au point de voir le jeune Léo Barré lui prendre la place à l’arrière, Hamdaoui étant de plus en plus cantonné au banc des remplaçants ou décalé sur une aile.
Mais contre Pau, son match fut à conjuguer au plus-que-parfait.Malgré les trombes d’eau, il a su se montrer impérial sous les ballons hauts, sûr dans chacune de ses initiatives, n’hésitant pas à porter le ballon. Avec d’autres recrues qui feront prochainement leur début, à l’instar de l’international samoan Michael Alaalatoa ou du très prometteur talonneur Barnabé Massa, les Clermontois peuvent s’appuyer sur des joueurs revanchards, qui apportent une réelle plus value.
Contre le Racing, les premières limites derrière ?
Comme écrit précédemment, nous ne tirerons pas de conclusions hâtives après si peu de matchs. Cependant, malgré la défaite, une semaine après au Racing, les joueurs de Christophe Urios ont prouvé dans plusieurs domaines qu’ils pourraient enfin être de solides candidats au Top 6.
Pendant soixante minutes, les Jaunards ont mis à mal les Racingmen, menant même à l’heure de jeu. Avant de totalement s’écrouler, et d’encaisser trois essais coup sur coup. Hormis ces sept minutes fatales, les partenaires de Baptiste Jauneau réalisaient le match parfait.
Bons en défense comme face à Pau, dominateurs devant, impériaux en mêlée, les pensionnaires du Michelin pensaient revenir du Val-de-Marne avec un succès dans les bagages. Il n’en fut rien, la faute donc à ce trou d’air. Les points noirs seront sûrement ce manque de réalisme, déjà présent lors des vingt premières du match contre Pau, ces lancers égarés et ces errements défensifs surprenants pour une équipe qui s’était montrée performante dans ce secteur.
Encore une fois ce jour-là, le pack s’est montré supérieur à son adversaire. En revanche, le seul point d’interrogation en ce début de saison se porte sur les trois-quarts. Les Auvergnats n’ont pas dans leurs rangs de « facteur X » comme la plupart des équipes du Top 6.
Comprenez là, des joueurs capables de faire basculer la rencontre sur un éclat. Il faudra donc trouver la faille collectivement. Et c’est là que l’ASM a encore du travail. Christophe Urios le regrettait justement, lors de l’entraînement ouvert au public de la semaine : « Face au Racing, on n’a pas fait le match qu’on voulait faire, en trouvant de l’alternance entre avants et trois-quarts. Notre jeu n’était pas huilé ni en place, on a claqué au milieu du terrain, on a sur-utilisé nos avants. Ce n’est pas le jeu qu’on veut faire. »
Ce manque de créativité, plus particulièrement au centre du terrain, constitue l’axe de progression du jeu clermontois. En recevant l’Aviron Bayonnais ce samedi, certes revanchard après la déculottée subie à Pau, mais tout de même inquiétant en ce début d’exercice, l’ASM devra essayer d’alterner et de trouver ce liant entre avants et trois-quarts. Face à un adversaire à leur portée, l’occasion semble rêvée.
Cette alternance passera également par un match solide de la charnière, à l’ouverture notamment. S’il s’est affirmé comme l’un des meilleurs demis d’ouverture du championnat, Benjamin Urdapilleta, 38 ans, commence peu à peu à faire son âge. Malgré tout son talent, il ne pèse plus sur les rencontres comme avant. Anthony Belleau, lui, alterne le chaud et le froid et devra hausser encore son niveau de jeu s’il veut aider son club à retrouver les phases finales.
Toujours est-il qu’avec désormais un groupe qui se connaît bien, renforcé par l’apport de joueurs rodés au Top 14, un pack retrouvé et bien supérieur à l’an passé, des jeunes pleins de potentiel comme Tixeront, Massa ou Fall et un projet de jeu bien défini, l’ASM peut enfin, espérer retrouver le top 6 en fin de saison. Il faudra assimiler le plan de jeu souhaité par Urios et réussir à trouver davantage de repères dans la ligne arrière. Et si cela prend forme, alors, Clermont sera de nouveau un adversaire redoutable.
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